Abidjan, le jeudi 10 juillet 2025(LDA)-La Côte d'Ivoire est engagée dans un combat mais fondamental, où chaque goutte d’eau compte. Un combat où le progrès se mesure au débit d'un robinet dans une cour d'Abidjan ou au son d'une pompe dans un village du pays.
Ambition affirmée
L'accès à l'eau potable, bien plus qu'une commodité, est devenu le miroir éclatant d'une ambition affirmée au plan nationale et d'une volonté politique ferme. Le constat initial était sévère. En 2016, seul un Ivoirien sur deux bénéficiait d'un accès à l'eau potable. Un chiffre qui sonnait comme un défi à relever, une injustice à combattre. La réponse ne s'est pas fait attendre. Lancé en 2017 avec l'objectif audacieux de l'accès universel d'ici 2030, le programme "Eau pour tous" a insufflé une dynamique transformatrice. Les résultats parlent d'eux-mêmes : un bond spectaculaire de 50% à 81% de couverture nationale en seulement cinq ans. Cette progression n'est pas un hasard statistique, mais la traduction tangible d'un investissement massif et assumé : 1 320 milliards de FCFA engagés sur la durée du programme.
2017 : “Eau pour tous”
Ces milliards ont déjà commencé à couler vers la justice sociale. 233 964 branchements sociaux ont ouvert les robinets à des centaines de milliers de foyers modestes, tandis que 1 080 localités, autrefois oubliées, ont été désenclavées et reliées au réseau de la modernité. Cette toile se tisse aussi grâce à des infrastructures vitales : plus de 30 châteaux d'eau construits, 624 forages creusés, soutenus par des alliances stratégiques comme le PASEA, financé par la Banque Mondiale à hauteur de 825 millions de dollars pour les régions du Nord.
À Abidjan, mégalopole assoiffée, le défi est d'une autre ampleur. La réponse se construit en amont, avec des ouvrages structurants emblématiques : les usines de la Mé et, surtout, le projet pharaonique de la station de traitement du Lac Aghien.
Déclarée d'utilité publique et soutenue par des partenaires comme l'AFD et la BEI pour 214 milliards de FCFA, cette future installation promet d'alimenter jusqu'à 35% des besoins de la capitale économique (100 000 à 150 000 m³/jour).
Dans la ville même, le Projet d'Assainissement et de drainage des eaux pluviales de la Ville d’Abidjan (APTF) illustre une exécution minutieuse, méthodique, rigoureuse : 83% de taux d'exécution global, près de 770 km de canalisations posées, 121 387 compteurs subventionnés installés, et une traque implacable aux fuites avec plus de 200 000 anomalies corrigées. Cette gouvernance plurielle, associant ministères, institutions techniques et opérateurs, a été la clé de voûte de ces réalisations complexes.
De 50 à 81% de couverture en cinq ans
Chaque robinet qui coule, chaque pompe qui fonctionne, marque une victoire. C'est la fin d'une corvée épuisante pour des milliers de femmes et d'enfants, c'est un bouclier sanitaire renforcé contre les maladies hydriques, c'est un ferment essentiel pour le développement économique et social.
Le bond de 31 points en cinq ans est une réussite dont la Côte d'Ivoire peut légitimement s'enorgueillir. Cependant, le flot d'eau se doit de devenir une marée parce le fleuve n'a pas encore atteint son embouchure. La dernière ligne droite vers le "100% en 2030" exige une vigilance accrue. Des retards, comme sur la Composante A de l'APTF (ressources), doivent être comblés. La sécurisation durable des ressources en amont est cruciale pour la pérennité des réseaux. Le rythme soutenu des branchements ne doit pas se faire au détriment de la durabilité des installations ou de la lutte contre les fuites, vitale pour l'efficacité économique du secteur. Surtout, l'effort national doit impérativement se décentraliser.
Si Abidjan capte l'attention, l'objectif "Eau pour tous" exige la même intensité dans les villes secondaires et les zones rurales reculées, où les défis logistiques et financiers sont souvent les plus redoutables.
La Côte d'Ivoire a démontré sa capacité à mobiliser des ressources colossales et à les transformer en progrès concret. L'eau coule désormais plus librement à travers le pays. Le défi désormais est d'assurer que ce flux vital atteigne, sans faillir ni tarir, chaque foyer, chaque école, chaque dispensaire d'ici 2030. Car derrière chaque robinet qui s'ouvre, c'est bien plus que de l'eau qui jaillit : c'est la promesse d'une vie plus digne et d'un avenir plus juste pour tous les Ivoiriens. La détermination affichée doit maintenant se muer en réalisation irréversible.
L'Histoire et surtout les générations futures attendent.
Auteur: Bakary Cissé